Dennis Kelly – Love and Money

Dennis Kelly
Love and Money
2006
Théâtre
Angleterre

Love and Money – Dennis Kelly / Blandine Savetier – Bande annonce from AlterMachine on Vimeo.

Vidéo tirée de la mise en scène par Blandine Savatier en 2014

Love and money est une pièce de Denis Kelly écrite en 2006. Cette oeuvre examine la destruction de l’amour par le matérialisme et l’argent.Les deux personnages principaux sont David et Jess.

David essaie d’entretenir une relation avec une femme qui le questionne sur la mort de son ex-femme. Après que la femme ait longuement insisté, David révèle qu’il a aidé sa femme à se suicider pour échapper à ses dettes. La pièce remonte ensuite quelques mois auparavant où le père de Jess, l’ex-femme en question, détruit une statue sur la tombe d’une autre personne au cimetière car, elle fait de l’ombre à celle de sa fille. Alors que la pièce remonte le temps avant la mort de Jess, dans une scène irréelle, Jess et David discutent la nature de l’amour et de l’argent. Encore auparavant, David se fâche contre Jess qui était encore en train d’acheter quelque chose. Enfin, la pièce se termine sur un monologue philosophique de Jess à qui David vient de proposer de se marier.

C’est selon moi, dans cette dernière partie qu’il se présente à nous un texte d’une forte intensité et qui fait choc par la beauté de la vérité qu’il évoque. Dans cet extrait, Jess vient nous exposer ses théories sur l’existence humaine à la suite d’une émission qu’elle a vu sur la science astronomique et la théorie des multivers. Son expression est confuse et difficile et elle parle beaucoup par des tics de langage et en ne finissant pas ses phrases. Ainsi, c’est justement ce langage inhabituel qui va faire choc au sens que donne la définition du CNRTL comme : « une émotion violente et inattendue pouvant provoquer de grandes perturbations physiques et psychiques chez l’individu » ou «  une émotion intellectuelle frappant l’individu à la vue d’une œuvre artistique ». Pris dans un cadre quotidien, ce discours pourrait passer inaperçu. Cependant,  c’est en jouant avec les codes du quotidien et en les poussant au maximum que le texte donne toute sa puissance au langage et permet une plus grande concentration sur le message transmis par le texte. En effet, cette confusion du langage est au service du sens du texte et d’une confusion encore plus grande : à savoir notre rapport à la complexité de l’univers qui est ici expliqué par Jess. Le second choc (bien que le premier soit très léger et soutienne le sens du texte) est un choc qui pourrait s’apparenter à une révélation face à la vérité des propos énoncés. Le texte révèle en mot ce que l’on voudrait pouvoir formuler sans pouvoir le faire à savoir notre extase devant la cohérence si insoupçonnée de l’univers et notre recherche voire une évidence d’un sens à ce monde (« qu ‘est ce qui vous gêne dans la notion de but ») C’est en dépassant le langage quotidien que le texte arrive à se hisser à la hauteur de ce qu’il voudrait exprimer, soit une grandeur émotionnelle et psychique plus encore qu’intellectuelle. Le langage lui même devient matérialité émotionnelle et crée de ce fait un langage proprement théâtral.

Le choc théâtral ne provient pas forcément d’une œuvre brusque et violente mais peut aussi se trouver dans les détail d’un texte qui lui donneront toute sa valeur et dans la vérité intrinsèque du texte. Il serait important de noter que c’est par se moyen que se dévoilent les grandes œuvres théâtrales et plus encore, le langage théâtral.

Par Jade Bou Ferraa
Université Sorbonne Nouvelle – Paris3, L3, 2017