Milo Moiré – PlopEgg 1

Milo Moiré
PlopEgg 1
2014
Performance
Allemagne

Lors d’un rassemblement autour de l’art contemporain en 2014, l’artiste Milo Moiré peint une nouvelle œuvre. Seulement, celle-ci fait scandale auprès du public car, la performeuse peint nue, au-dessus de la toile vierge, en expulsant des œufs remplit de peinture de son vagin. Ainsi, la toile est recouverte de peintures de teintes différentes qui se superposent. La technique d’explosion des œufs brisés rappelent le « dripping », qui consiste à apposer des jets aléatoires de couleurs sur une toile. Seulement, ici, l’artiste peintre est à vue et transforme un moment de création en performance en travaillant la toile devant les spectateurs.

Dans cette œuvre « PlopEgg », le corps de l’artiste au travail est mis en avant, nu, dans une posture de travail et en « expulsion ». Ainsi, le corps féminin qui est habituellement associé au désir à une hyper-sexualisation perd ce sens coutumier pour aller vers un corps qui expulse, force, pousse, pour donner naissance. L’œuvre se focalise sur la création – ou plutôt procréation – en plaçant l’artiste comme mère de son œuvre, qui souffre, dans toute sa nature même, pour donner vie. L’œuvre est profondément féminine, en plaçant le vagin – symbole du féminin – au centre de tout le processus. De plus, on notera une prépondérance des teintes rouges, qui peuvent rappeler les menstruations et donc replacer la femme dans une position de Mère (à la manière de « L’origine du monde » de Courbet).

Nous sommes face à une mise en abîme du processus artistique mais, cette performance impulse de vives réactions dans le public dans le contexte de sa présentation dans l’Opening of Art. Les médias quant à eux s’emparèrent rapidement de l’œuvre.

La performance a connu un scandale : « ce n’est pas de l’art, mais de l’exhibitionnisme[1] ». Ainsi le public, gêné face à a propre vision du corps et de la non-acceptation de la nudité en soi, provoque une dimension sexualisante au travail de Milo Moiré. Le fait que la performance se déroule en extérieur, à la vue de tous, créé un choc chez certains spectateurs et journalistes qui se refusent à considérer « PlopEgg » comme une œuvre d’art. La performance est parfois qualifiée de « pornographique », ce qui nous prouve à quel point le schéma sociétal du XXI ème siècle impose la sexualisation dès l’apparition d’un corps nu. Le corps féminin est, dans l’archétype, délicat, lisse et souple. Ici, il expulse, rejette, dans une posture qui ne cherche pas à être élégante. C’est cette dimension qui scandalise le public, dérangé dans sa propre perception de lui et d’autrui. Le corps féminin est ici sacralisé dans toute sa nature, en abandonnant les carcans et la bienséance que le spectateur attend du corps. Sans médium, sans cadre, on impose une plongée dans l’œuvre sans mise à distance, et cela perturbe.

Par Romane Rivol
Université Sorbonne N
ouvelle – Paris3, L3, 2017

[1]Nouvel Obs, VIDEO. Elle peint avec son vagin. Ce n’est pas de l’art mais de l’exhibitionnisme, Giuseppe Di Bella, publié le 17 avril 2014