Lia Rodrigues Companhia De Danças – PARA QUE O CÉU NÃO CAIA

Lia  Rodrigues Cia De Danças
PARA QUE O CÉU NÃO CAIA
(Pour que le ciel ne tombe pas),
2016
Danse
Rio de Janeiro

La chorégraphe brésilienne Lia Rodrigues a créé le spectacle Para que o céu não caia (Pour que le ciel ne tombe pas), en 2016, dans la favela de Maré à Rio de Janeiro où sa compagnie est installée depuis 2004. La chaleur intense qui régnait lors des séances de travail, avec des pics pouvant aller jusqu’à 40°C, a amené la chorégraphe et ses danseurs à se questionner sur les problématiques du monde contemporain, notamment à celles du réchauffement climatique.

« Il existe un seul ciel et nous devons le préserver, car, s’il tombe malade, tout disparaîtra. » La prophétie du shaman  du peuple yanomami vivant dans la forêt amazonienne, Davi Kopenawa est un des points de départ artistiques de Lia Rodrigues. Elle déclare : « Le monde ne va pas bien du tout, déclare avec force la chorégraphe brésilienne. Le changement climatique en est un indicateur particulièrement inquiétant. Que fait-on dans un monde qui coule ? Comment résister, survivre et continuer à travailler ? Que signifie être artiste aujourd’hui ? Ce sont des questionnements qui me taraudent au quotidien et qui se trouvent à la source du spectacle » .

Dans cette performance, la nudité des danseurs est crucial. On peut imaginer que ce choix s’est imposé à eux dans le processus de création, face, par exemple, aux conditions météorologiques difficilement supportables pendant les répétitions. Ainsi, ils ont subi une conséquence du réchauffement climatique et veulent le faire ressentir pendant la performance.

Pendant l’heure que dure la pièce, les danseurs évoluent sans musique. La chorégraphie consiste en une suite de mouvements et comportements primitifs qui  rappellent à l’homme sa condition première. Les râles et les cris des danseurs les rapprochent de l’animal. Ils se déshabillent dès leur entrée sur le plateau ; le public est invité à former un cercle autour d’eux. Au fur et à mesure de l’avancée du spectacle, les danseurs se recouvrent le corps de farine, de chocolat en poudre, et d’épices, représentant la terre et ce qu’elle offre aux hommes. Para que o céu não caia présente le nu comme une nécessité. C’est cette approche du corps qui peut faire choc chez le spectateur. Lia Rodrigues a clairement voulu confronter le public à la nudité et à cette condition (choisie, dans le cas de ses acteurs, mais souvent subie par les populations mondiales ; c’est là que réside la portée dénonciatrice et politique du spectacle de la chorégraphe brésilienne). Les spectateurs sont invités à évoluer dans l’espace en même temps que les danseurs, entraînés par leur mouvement. Le public se retrouve très proche des corps des danseurs qui s’approchent volontairement et viennent confronter chaque personne du public à son tour en initiant un face à face. C’est la violence de l’image ainsi créée : un corps nu et recouvert de « terre » face à quelqu’un habillé de façon ordinaire qui crée un choc visuel et qui fonctionne comme dénonciation d’une injustice.

Par Chloé Aubert
Université Sorbonne Nouvelle – Paris3, L3, 2017