Harmony Korine – Spring Breakers

Harmony Korine
Spring Breakers
2012
Film
États-Unis

 

Prenez des anciennes stars de Disney Channel. Mettez-les en bikini, une arme et de la drogue dans la main. Vous obtenez Spring Breakers.

Ce film narre l’histoire de quatre étudiantes qui descendent à Miami faire le « spring break » (les vacances de printemps universitaire américaines), Spring Breakers raconte la fin de l’insouciance et des rêves roses bonbons de petites filles. Dans une Amérique dévastée par la course au « fun » et l’amusement continue, le réalisateur Harmony Korine nous fait voir le passage du rêve au cauchemar.

L’esthétique de ce film est profondément trash. D’abord, le décalage entre la situation initiale et ce que vont vivre les personnages crée du trash. On provoque le spectateur en lui montrant de la violence qui provient de ce qui symbolise la jeunesse et la beauté. Certaines des jeunes femmes iront jusqu’au meurtre avec une cagoule rose sur la tête.

Le trash vient aussi du fait que l’œuvre se base sur la culture populaire et le mauvais goût.  Tout le film fait penser à un clip de rap : un rythme rapide du au montage, les couleurs sont flashy, les femmes y sont toutes érotisées, la drogue et les armes y sont omniprésentes. D’ailleurs, le personnage d’Alien interprété par James Franco est fortement inspiré du rappeur Riff Raff. Ce dernier est connu pour son ridicule et la caricature du rappeur bourru qu’il semble être. Alien est aussi le personnage qui va amener peu à peu les filles vers des actes illégaux. Ce personnage est aussi l’ennemi de « Big Arch » se trouvant être le personnage le plus dangereux de tout le film, il est interprété par le rappeur Gucci Mane. Rappeur d’exception, Gucci Mane est aussi connu pour ses nombreux passages en prison pour possession d’armes, vente de drogues ou encore pour avoir tué (par légitime défense) un membre de gang.

On pourrait faire l’analogie entre le mauvais rappeur, petit gangster qu’est Alien, et son inspiration de Riff Raff, et la dangerosité du personnage de « Big Arch » autant que de l’acteur qu’il l’interprète : la réalité rattrape la fiction. Le réalisateur Harmony Korine, par le biais de ces deux personnages, montre l’évolution de la violence. La première est grandiloquente, clinquante  et parodique. La seconde tout aussi grandiloquente et clinquante mais, néanmoins, beaucoup moins drôle. Tout le film se fonde sur l’escalade de la violence. Au tout début du film, les quatre étudiantes organisent un braquage d’une épicerie, elles en sortent hilares avec l’argent de la caisse. Puis, la dernière scène du film montre l’assassinat d’Alien toujours par des jeunes filles en maillot de bains mais, cette fois-ci, sans paroles, ni rires.

Le film Spring Breakers suinte le trash par le fait qu’on y aborde la violence des images commerciales : le bonheur, la beauté… Tout devient difforme, laideur et vulgaire, sous le filtre des voitures de luxe jaunes et des strings fuchsias. De ces joies artificiels, de cette obligation de rire, née une violence pétaradante et angoissante, au vu de son réalisme, dans ce monde de divertissement total.

 Par Matthieu Bousquet
Université Sorbonne N
ouvelle – Paris3, L3, 2017