Adel Abdessemed – Don’t Trust Me

Adel Abdessemed
Don’t Trust Me
2008
Vidéo
France

Adel Abdessemed Don't Trust Me

L’artiste Adel Abdessemed est né en Algérie en 1971. Il rencontre le peintre Chérif Merzouki pendant son enfance et le verra mourir dans ses bras. Il intègre l’École supérieure des beaux-arts d’Alger en 1994 mais la quitte à la suite de l’assassinat par les islamistes extrémistes du directeur Ahmed Assalah et de son fils, dans l’enceinte de l’établissement. À la suite de cela, il quittera le pays à l’âge de 23 ans pour fuir les islamistes radicaux. L’artiste a donc été témoin de terribles violences durant sa jeunesse. Visionnaire, toute son œuvre est empreinte des violence du monde et il transforme la violence de la guerre en matériau sans fin.

Dans Don’t Trust Me, l’artiste filme quelques secondes de la mise à mort d’un cheval, d’un cochon, d’un faon et d’une chèvre. Il les fait passer en boucle, ce qui plonge le spectateur dans le carnage en direct et en continu. Le tuerie sans état d’âme fait ressortir toute l’humanité de l’agonie de ces animaux. L ‘effet est terrifiant et se sert de l’horreur de l’abattage des animaux, pour faire réfléchir à la violence de notre monde en guerre.

Don’t trust me a été très mal reçue aux États-Unis, au point que l’Institut d’Art de San Francisco a décidé d’annuler son exposition quelques jours après son inauguration. Plus encore, le festival international d’art contemporain de Glasgow a refusé d’installer cette œuvre. En Italie des associations ont porté plainte, mais celles-ci n’ont pas abouti car les animaux ont été abattus dans une ferme mexicaine où cette pratique est légale. Le conseiller pour l’environnement de Turin a déclaré au New York Times :

« Montrer de telles choses est inopportun. Ces images pourraient inciter les personnes à les imiter. »

En 2009, un groupe Facebook rassemblant près de 200 personnes s’insurgeaient de cette « cruauté de l’artiste face aux animaux » .  Adel Abdessemed indique que son but était d’« obliger à réfléchir sur la violence» sans vouloir créer une polémique.Élisabeth de Fontenay dit, à propos de l’œuvre d’Adel Abdessemed :« […] Pour comprendre la démarche animalière d’Abdessemed, il faut d’abord suspendre momentanément les débats de société, les réquisitoires suscités par les justes luttes contre l’élevage industriel et le braconnage des animaux sauvages, les discussions sur le végétarisme et sur l’expérimentation animale. […] Adel Abdessemed n’aime pas le sang. Et ce qui signale à mes yeux qu’il n’est pas pervers, c’est qu’il a connu la violence et qu’à la différence de ces artistes qui végètent dans l’absence européenne de guerres et de révolutions, il a subi les affres de l’histoire, la vie nue, l’état d’exception, l’état d’animal blessé. Ses pièces animalières n’en sont pas pour autant indemnes de tout soupçon […] »

Par Jade Bou Ferraa
Université Sorbonne Nouvelle – Paris3, L3, 2017