Vladimir Nabokov

Scandale

Lolita, roman paru en 1955

L’œuvre de Vladimir Nabokov la plus connue et à juste titre est Lolita, parue en France en 1955. Elle fait partie de ces œuvres qui sont ce qu’on appelle des «succès de scandale». Son succès viendra d’abord du scandale provoqué.

Lolita, c’est l’histoire de la confession d’Humbert Humbert quadragénaire obsédé et éperdument amoureux de sa belle fille de 12 ans, Lolita avec laquelle il vivra une idylle tumultueuse à travers l’Amérique, avant que cette dernière ne s’échappe pour s’enfuir avec un auteur pédophile reconnu.

Pour analyser la dimension scandaleuse, il faut d’abord revenir sur la genèse de l’ouvrage. Nabokov écrit Lolita en anglais américain en France et se voit refuser la publication aux Etats-Unis par quatre éditeurs réticents et craignant même la prison. Il faut rappeler qu’à cette période, nous sommes en plein Maccarthysme. Nabokov trouve alors un éditeur en France, Olympia Press dirigé par Maurice Girodias, particulièrement spécialisé dans la publication en anglais de textes sulfureux (Henry Miller, Sade..) voire pornographiques, ce qu’ignorait l’auteur. Lolita sera d’ailleurs publié dans la collection verte, la plus scabreuse.

Le scandale naîtra après la parution d’un article britannique qui amènera les autorités britanniques à s’intéresser à ce livre entré clandestinement dans le pays. Le Home Office fera pression sur le ministère de l’intérieur français pour faire interdire le roman. La censure sera levée un temps en 1958, date de parution aux Etats-Unis où Lolita sera un succès.

Outre les thématiques de la pédophilie et de l’inceste, incontestablement choquantes, c’est la narration qui sèmera particulièrement le scandale. Les lecteurs ne réussiront plus à distinguer l’auteur-du narrateur et s’interrogeront sur les inclinaisons de Nabokov lui-même et sur sa complaisance à l’égard de son personnage.

50 ans après, l’aspect scandaleux ne s’est pas amoindri, la pédophilie et l’inceste étant des sujets plus brûlants que dans les années 50. D’ailleurs, l’adaptation cinématographique d’Adrian Lyne produit par Pathé n’a pas pu être projetée aux Etats-Unis en 1997, les distributeurs étaient trop frileux. L’histoire se répète.

Par Magali Gimenese
Sorbonne-nouvelle Paris3, 2015