Marie Josée Mondzain – L’image peut-elle tuer ?

Marie Josée Mondzain
L’image peut-elle tuer ?
2002
Ouvrage théorique
France

Marie José Mondzain est philosophe, directrice de recherches et spécialiste de l’analyse de l’image. Dans son ouvrage analytique L’image peut-elle tuer ?, elle interroge la fonction de l’image, ses origines, ses détournements, mais surtout son rapport à la violence. Elle met ce rapport à la violence en lien avec la réception du spectateur et ses effets sur celui-ci. En effet, elle part du postulat que l’image règne sur son interlocuteur depuis toujours, mais que nous n’en avons que trop peu conscience. Nous allons alors nous appuyer sur trois points que l’auteure analyse tout au long de son livre, afin de voir de quelle manière s’instaure un climat de terreur dans l’image contemporaine. Tout d’abord, nous allons aborder les origines de l’image en particulier dans la religion puis, l’origine de la terreur et son lien à l’image. Ensuite, nous allons aussi nous interroger sur le rapport de l’image à la performance, entre fiction et réalité. Enfin, nous étudierons le rôle de l’image sur le spectateur et celui des médias sur l’image.

Les sources de l’image

Origines religieuses

L’auteur part du postulat que l’image possède un contrôle sur son interlocuteur.Celle-ci possède le pouvoir d’introduire dans le quotidien des individus des idées, des pulsions ou encore des envies, qui déterminent sa vie et ses pensées. Elle nous explique que depuis toujours ce contrôle est présent dans la vie des hommes et en particulier par le prisme de la religion. Elle prend pour exemple la religion chrétienne qui a longtemps utilisé l’image pour trouver des adeptes, en particulier lors des croisades et la guerre de Cent ans. Par exemple, il était sollicité l’iconographie liée à la  Passion, à l’image du Père ou encore à celle du Christ, afin de prouver que la chrétienté est une bonne religion.

« La religion chrétienne est la première et la seule doctrine monothéiste à avoir fait de l’image l’emblème de son pouvoir et l’instrument de toutes ses conquêtes[1] ».

L’image est donc un instrument. C’est un instrument de pouvoir et de manipulation montrant que l’image « de l’incarnation et de la résurrection de l’image du Père » est une gloire pour leur religion permettant de partager une émotion commune par le culte. Mondzain parle d’iconocratie pour désigner ce culte. La religion permet un identification internationale et donc, commune au peuple. Cette identification passe donc par une appartenance à un groupe, et donc au fait de se sentir pleinement exister par cette appartenance, essentielle à l’être humain.

Les sources de l’image trouvent leur naissance dans la religion, mais aussi dans les diverses croyances issues de sources diverses  comme le mythe de Narcisse amoureux de son propre reflet. L’image fait partie intégrante de nos mythes et traditions. Celle-ci prend son pouvoir aussi dans nos peurs venant de croyances, comme les histoires de sorcellerie, de loup-garou ou encore d’esprits. Elle vient aussi de nos désirs les plus enfouis et de nos rêves cauchemardesques. « Est-ce qu’une image peut tuer, est-ce qu’une image rend tueur ? [2] »; l’image prenant racine dans nos croyances peut vraisemblablement nous pousser à tuer. Si l’on revient sur le pouvoir de l’image religieuse qui a sévit durant les croisades et tuer ceux qui n’étaient pas partisans du Christ alors, en effet, l’image « objet sans corps, sans main, sans volonté [3] » peut, en effet, pousser l’homme à tuer.

L’origine de la terreur

L’auteure part d’un premier constat : « Les actes de violence gratuite ne cessent, dit-on, de se multiplier dans notre société, dominée au même moment par un accroissement du spectateur des visibilités[4]» .  Il s’agit de mettre en lumière le fait que les images envahissent notre quotidien en prenant sa source dans divers médias existants, écrans et appareils, tous de plus en plus connectés. Ceux-ci  organisent la terreur. Cette alimentation féroce faite par les médias amène Mondzain à penser que l’image de la terreur est devenue un moyen économique dans notre société : « La peur actuelle, la vraie raison peut-être, vient du fait que la production visuelle est devenue un marché à part entière[5] ». L’image a toujours été utilisée comme un outil, nous l’avions constaté à partir de la religion chrétienne qui s’en est servie dans sa campagne pour trouver des adeptes. Cependant, avec l’arrivée de l’ère technologique, l’image est devenue omniprésente et ainsi la terreur aussi s’accroît. Cette image est tellement omniprésente que nous ne nous rendons plus compte de l’impact qu’elle a sur notre quotidien. L’image est dans la publicité, les transports en commun, les affiches, sur les murs des institutions, des cafés ou encore, des supermarchés. L’image est devenue un moteur économique mangeant tous les espaces vierges.

Le deuxième constat de Mondzian s’articule autour de l’impact de l’image dans sa capacité à faire ressentir de la peur. En particulier, elle développe sur des événements extrêmes qui débordent de tous les écrans, notamment les attentats du  11 septembre. L’auteure y voit un basculement dans l’histoire de l’image qui devient elle-même une peur, partant d’un choc visuel. L’image passe son message par le visuel. Ce visuel est le moyen de médiation entre le fait et le spectateur, amenant donc une relation de cause à effet. La réception se suit d’un choc qui se manifeste par le sentiment de peur chez le spectateur. « Les images apparaissent comme une réalité sensible offerte simultanément au regard et à la connaissance[6] ».  On peut alors légitimement se demander si la violence n’est pas objectivée par l’image.

L’auteure, au fur et à mesure de sa réflexion, approche une conception de la violence de l’image, en associant l’histoire de la violence à celle des images. Elle précise que : « L’histoire de la violence est tout à fait indissociable des images aussi longtemps qu’on dissocie ce qui se joue en elles du destin du jugement critique et de la parole, donc ce qu’il en est de la place de nos corps et de notre pensée dans la rencontre avec les objets[7] ». Par exemple, dans l’Antiquité Grecque le théâtre et la vie politique de la cité ne faisaient qu’un. Tous les hommes et les femmes, même les esclaves, avaient l’obligation de se rendre au théâtre. Les images terrorisantes des tragédies obligeaient le public à avoir peur et mal afin que ce lieu commun devienne leur exutoire. La violence des images faisait partie de leurs obligations de citoyen. Le peuple se devait de confronter son corps et sa pensée à ces images.

L’image performance

Performance et fiction

L’auteure définit la fonction de la performance comme ceci : « La performance est non seulement le terme au moyen duquel on évalue des rapports mercantiles et concurrentiels, non seulement le terme qui sert à sélectionner les personnes et les formes, mais c’est sous ce signe que le champ de la culture et des productions symboliques se trouve investi de la façon la plus violente [8] ».

La performance est à l’intérieur de l’image, cette image de la terreur, car la performance est la force même de cette terreur. En employant aussi le terme de spectacle lorsqu’elle parle d’image dans son ouvrage, Mondzain nous renvoie à l’idée que la performance est une forme de spectaculaire, hybride, de l’instant et doit faire de cet instant un choc, pour que le public soit marqué. Les performances sont très souvent engagées et elles s’engagent par les images qu’elles diffusent. La performance devient un consensus culturel et commercial, où en effet comme nous l’avons dit plus tôt, l’image est utilisée à des fins économiques. Ainsi, c’est l’image en tant que performance qui lui permet d’être utilisée comme outil budgétaire.

L’image est devenue pour Mondzain une performance, notamment si on la considère comme quelque chose d’« informe, c’est-à-dire quelque chose qui tient à la fois du chaos et de l’indétermination[9] ». Cet informe serait alors d’après l’auteure, l’origine du geste, et donc l’origine de la performance. Cependant en parlant simplement de la performance en tant que tel, on reste dans le domaine de la fiction où la performance reste cadrée et produit un spectacle. Elle définit alors le travail de la performance comme « une traversée vers un aboutissement, processus qui va de l’informe vers la forme, de l’obscur à la lumière vers les formes symboliques[10] ». Il s’agit en effet de limiter cette performance au domaine du symbole. Nous pouvons mettre en lumière cette idée avec le rite péruvien nommé la Fête du Sang.

Cette fête fut au départ une fête sacrée, célébrant le deuil et la transe d’un peuple. Elle permet de faire communier un peuple tout en performant ensemble. C’est un rite ancestral où l’on sacrifie un cheval en haut d’une montagne, puis un condor que l’on va rendre ivre et attacher à l’échine d’un taureau se trouvant dans une arène. De là, va commencer une corrida qui se terminera par la mort du taureau. Le condor sera ensuite relâché en héros au sommet de la montagne. Ce sacrifice est une fête, ayant lieu le 28 juillet, de commémoration pour l’indépendance du Pérou remerciant les Dieux. Cette fête est aujourd’hui devenue une performance touristique, une attraction qui enivre un public assoiffé de violence. Le rite est dorénavant retransmis sur des écrans géants comme si le public regardait un simple film. Cette performance procure alors, comme pour les péruviens, ivresse et transe au public et  sort la fête du sang de son contexte originel.

Nous pouvons alors nous demander quel est le rôle de cette performance : souhaite-t-elle rester dans le domaine de la fiction ? L’auteure dit que la performance est « transformante pour la communauté elle-même[11] » . Elle a donc bien un rôle. La limite alors entre fiction et réalité est très proche puisque les images performances, semblent avoir pour ressort dramatique de provoquer un geste chez son interlocuteur comme Mondzain le signale. Ainsi, la violence inouïe de la Fête du Sang n’est-elle pas justement de provoquer chez le spectateur des émotions qu’il ne saurait contrôler ? On revient alors à l’idée que l’image performance peut être responsable en objectivant la violence.

Performance et réalité

La performance vacille entre fiction et réalité. Cette forme finalement informe comme le dit l’auteure, tenant du « chaos et de l’indétermination », fait basculer les images que le spectateur voit de la fiction à la réalité.

Monzain met en rapport la réalité de la performance et le réel qui nous entoure avec le spectateur. Elle constate que « dès lors il y a performance quand le déplacement fictionnel opéré par une forme est mené à son achèvement c’est-à-dire a réussi à déplacer la relation du spectateur à la réalité elle-même[12] ». La perception de l’image performante change en fonction de la perception du spectateur et sort ainsi de son champ d’application de fiction. Chacun voit sa propre réalité et donc, chaque performance et image n’ont pas le même impact sur l’individu. Cela se rapproche de l’idée du 5ème mur que Castellucci met en avant dans son théâtre. Il dit que le spectacle à lieu entre l’objet représenté et le spectateur, le 5ème mur est alors l’imaginaire du spectateur, où se créé le sens, où naît le théâtre. Ainsi il projette son interprétation :il peut donc y avoir des interprétations diverses et ainsi, des erreurs.

La violence est bien réelle à travers la réception de l’image par le spectateur. Celle-ci choque, bouscule et donc est violente. Cela l’est encore plus si son contenu est violent et arrive sans médiation. Par un choc provoqué par l’image violente, la fiction de l’image devient une réalité par l’interprétation que le spectateur en fait. Mais aussi par la force de l’image et de sa manière de conduire la violence jusqu’à l’inconscient du spectateur, qui provoque une fiction tellement forte et vraisemblable, que l’on bascule dans le réel.

Mondzain à propos de la performance affirme que l’on trouve « un renversement pervers du régime fictionnel lorsque c’est le réel qui est produit sous le signe de la performance et que le spectateur privé de tout déplacement se trouve retenu comme un otage de l’informe[13] » . Par exemple, le spectacle du 11 septembre 2001 où l’auteure analyse cet événement qui ressemble d’avantage à une mise en scène de la part du terrorisme, de par la revendication, les caméras filmant le crash, les médias relayant ces images et l’ampleur internationale. On trouve dans cet événement un vacillement entre spectacle, performance, et fiction. Cette fiction mise en scène par le relais de l’information, la réception des images, amenant un fait réel et violent à devenir une fiction performative, où les images maintiennent le spectacle. Le spectaculaire de la performance est utilisé pour générer des émotions chez le spectateur. Ainsi le rôle de la performance devient radical et réel mettant bel et bien le spectateur en otage face à tout l’événement. Ainsi, nous voyons que la performance des images est plus réelle lorsque la violence est mise en scène et devient un spectacle pour les yeux. Et c’est à travers le spectaculaire de la performance que le choc provient dans la fiction pour devenir réalité pour le public.

Médiation et médias

Image incarnée médiatrice d’émotions

Nous l’avons dit plus tôt, la performance vacille entre fiction et réalité. Il s’agit alors de mettre en perspective la fonction de l’image performante que l’auteure définit comme « Faire voir ce n’est pas faire mais, faire faire[14] » . Ainsi, l’image permet par son impact sur son interlocuteur de devenir médiatrice d’émotions.

Mondzain émet une définition sur ce qu’elle appelle l’image incarnée qui en l’occurrence, en étant incarnée, vit et fait vivre une action ou un message qui va ensuite se lier à son public. L’image incarnée possède « trois instances indissociables : le visible, l’invisible et le regard qui les met en relation ». Le visible est l’image, l’invisible est l’inconscient du public qui interprète le visible, et enfin le regard de ce public qui permet un lien entre ces deux instances. Il s’agit d’interroger le rapport entre la violence et cette image incarnée qui transmet dans l’inconscient du spectateur des émotions. Mondzain précise : « Quand la violence surgit brutalement, sans médiation, elle n’est jamais l’indice de la force mais plutôt de la faiblesse. Cette violence-là est destructrice, elle produit une double exclusion, celle du violent et celle de sa victime, allant jusqu’au suicide aussi bien qu’au meurtre[15] » ; et rajoute aussi « les images apparaissent comme une réalité sensible[16]» . On dégage alors une ambivalence car, cette image incarnée, c’est sans médiation que sa violence surgit aux yeux des spectateurs mais, c’est cela qui fait médiation d’émotions. Sans ce surgissement, il n’y a pas d’émotions qui se développent. Ainsi, à travers le choc de cette violence qui surgit dans la visible, l’inconscient l’enregistre et va le garder, l’interpréter et devenir une émotion tout aussi violente que le choc qu’il a subit précédemment par l’image.

Il y a une influence hypnotique et inévitable de l’image que l’auteure met en avant à la fin de son ouvrage. Elle dit que lorsqu’on dit d’une image qu’elle est violente, on suggère qu’elle peut « agir directement sur un sujet en dehors de toute médiation langagière[17]» . Pourtant, si l’on met cette idée en relation au fait que l’image est un objet passif, ce que Mondzain développe aussi, cela interroge sur sa responsabilité.  Jusqu’où peut-elle être  médiation, jusqu’où va son influence, son « faire faire ». Par exemple, durant la Seconde Guerre mondiale où les nazis produisaient des films qui mettaient en avant la race aryenne, sa vertu, sa perfection, en opposition à ce qu’ils considéraient comme la race juive, représentée trompeuse, malsaine et plus généralement mauvaise. Mondzain explique que c’est par ces images de vertu que la violence et la haine sont nées : « L’image de la vertu ou de la beauté peuvent générer de la violence[18]». En effet, c’est en construisant une image héroïque du Führer et aussi l’image positive de la race aryenne dans les films de propagande que le nazisme s’est structuré en devenant notamment leur symbole de communautarisme. « Pour devenir tueur, la population nazie à dû se sacrifier elle-même[19] ». L’auteur montre le sacrifice de toute humanité chez les nazis  libérant une émotion de haine et de violence extrême, créée par les images des films, responsable de la Shoah. L’émotion ici est transmise par l’image qui sans médiation, influence son interlocuteur jusqu’à le faire devenir un meurtrier. Le « faire faire » et bel et bien présent dans cet exemple. Le nazisme par sa force de propagande contrôle les émotions du peuple. En prenant la population par les sentiments, il l’a manipulé et lui a instauré une manière de penser et de faire. L’auteure constate d’ailleurs qu‘« il est plus facile d’interdire de voir que de permettre de penser. On décide de contrôler l’image sur s’assurer le silence de la pensée[20] » . Par cette image incarnée de perfection aryenne, tout un peuple a été plongé dans l’horreur du nazisme, où l’image a enfermée la pensée individuelle pour instaurer une manière commune de voir le monde.

Choc et médias

L’image a le pouvoir de provoquer un choc sans médiation des émotions chez son interlocuteur et lui insuffler une impulsion qui peut être violente.

L’auteure met en perspective tout au long de son ouvrage, la responsabilité de l’image, qui est par définition un objet passif, sans bras, ni jambe, ni parole propre, qui ne peut pas vraiment, partant de ce postulat, influencer son interlocuteur. Cependant, Mondzain constate que la responsabilité n’est pas forcément celle de l’image mais dans ceux qui l’utilisent. À notre époque, nous trouvons un lien essentiel entre l’image et les médias. Les médias, toutes plateformes confondues, utilisent l’image pour transmettre leur image, car en effet, le premier sens que l’homme utilise depuis sa naissance, c’est la vue. Mondzain dit que « la terreur et les médias dépendent l’un de l’autre » . Les médias utilisent l’images pour faire performer la violence de manière systématique.

L’exemple qu’elle développe par rapport à cela ce sont les jeux vidéo. Ceux-ci créent une réalité virtuelle plus que réaliste. Les jeux vidéo sont, pour l’auteure, un exutoire pour les joueurs qui se projettent dans des intrigues de meurtres, de violences, de guerres, d’histoires de familles et d’héritages afin de libérer une émotion qu’ils enfouissent. L’auteure constate que « les jeux vidéo ont peu à peu banalisé et déréalisé l’usage sauvage et meurtrier des drones, yeux électroniques qui analysent des données et qui tirent aveuglément[21]». La banalisation de la violence dans les jeux vidéo est évidente, prenons par exemple la série de jeux Call of Duty, se déroulant durant la Première et Seconde Guerre Mondiale. Le joueur devient un meurtrier sanglant et sans aucune émotion ou empathie. La part de réalité est gommée par la fiction de l’image. Pourtant le joueur est face à une véritable violence, omniprésente dans ce média.

Mondzian constate aussi que les médias « opèrent en temps réel »[22]. Par exemple, avec Youtube « c’est le spectateur qui est aussi décapité symboliquement, car la pensée est radicalement privée du rythme que lui impose la patience du regard la respiration de la parole[23]» . Les courtes vidéos, les messages brefs, tout cela montés dans un enchaînement d’images dynamiques, rapides, puis lentes, avec des couleurs, des sons apparaissant à l’écran comme des attaques. Celui qui visionne la vidéo est prisonnier de toutes les informations simultanées qu’il voit. Il ne devient plus qu’un simple consommateur d’image, ne comprenant pas tout ce qu’il voit. Dans Youtube, on trouverait un trop plein de contenu où le spectateur ne peut plus penser par lui-même et devient la marionnette de ces images et en fonction de ce qu’il voit un choc s’opère. Ce choc peut transmettre de la joie, du bonheur comme de la haine et de la violence en fonction du contenu du média et de la manière dont la vidéo est faite. L’utilisation des médias pour semer la terreur est aussi quelque chose de très présent. En effet, Al-Qaïda, l’organisation ayant revendiquée les attentats du 11 septembre 2001, a utilisé les médias et en particulier les plateformes internet pour semer la terreur, montrer sa violence, revendiquer ses idéaux et instaurer la peur. C’est à travers un montage d’images chocs que l’organisation s’est faite une publicité sanglante. Nous pouvons ainsi comprendre l’idée de l’auteure que l’image, objet passif, en fonction de son utilisation par les médias, n’a pas toujours le même rôle. Les médias ont une responsabilité dedans.

Conclusion

L’image a depuis toujours un rapport au spectacle et au spectaculaire très important, qui lui permet de marquer les esprits. Cette image incarne et devient un exutoire pour celui qui la regarde, lui procurant des émotions que seul l’image peut lui communiquer. On trouve un rapport à la catharsis très fort dans l’image. C’est elle qui procure violence ou terreur, insuffle une énergie à son public qui devient prisonnier de l’image et dépendant de ses actions. Nous l’avons vu dans divers exemple comme la religion, le nazisme ou encore plus précisément avec la Fête du Sang et le 11 septembre 2001, que la terreur par l’image, l’image incarnée terrifiante et cauchemardesque, a un impact réel sur son interlocuteur. Nous avons aussi mis en perspective la véritable responsabilité de l’image qui finalement, nous pousse à nous demander si elle n’est pas elle aussi une victime des médias ou des hommes tout simplement.

À la fin de l’ouvrage, Mondzain ne donne pas vraiment de réponse à son titre « L’image peut-elle tuer ? ». En effet, l’image est un outil de médiation pour la violence depuis toujours et aussi un outil pour les médias. Une double énonciation naît de ce titre : soit l’image peut-elle impulser physiquement à quelqu’un l’envie de tuer, soit l’image, par son contenu choc, peut tuer le psychisme de l’individu. Ainsi, nous revenons à ce que Mondzain affirme : « Faire voir ce n’est pas faire mais, faire faire ». Nous pouvons aussi voir l’image avec une double fonction : l’image fait et fait faire aussi. Ainsi, l’image peut-elle vraiment tuer, faire voir mais aussi faire faire, ou reste-elle seulement un outil, un matériau dépendant des médias ou des hommes ? Plus encore, peut-elle être véritablement autonome ? L’ambiguïté sur sa force et sa responsabilité reste une question pour l’auteure.

Par Émeline Régnault
Université Sorbonne Nouvelle – Paris3, L3, 2017

[1] Marie-José Mondzain, L’image peut-elle tuer ?, Paris, Bayard, 2002, page 8.
[2] Ibid., page 30.
[3] Ibid., page 30.
[4] Ibid., page 19.
[5] Ibid., page 19.
[6] Ibid., page 23.
[7] Ibid., page 30.
[8] Ibid., page 106.
[9] Ibid., page 112.
[10] Ibid., page 115.
[11] Ibid., page 116.
[12] Ibid., page 116.
[13] Ibid, page 117.
[14] Ibid., page 116.
[15] Ibid., page 25.
[16] Ibid., page 26.
[17] Ibid., page 28.
[18] Ibid, page 27.
[19] Ibid., page 95.
[20] Ibid., page 153.
[21] Ibid., page 145.
[22] Ibid., page 146.
[23] Ibid., page 146;